L’art de voler ? Un titre qui questionne. Notre langue a ce pouvoir de laisser en suspens bien des interprétations pour une même expression. Antonio Altarriba et son traducteur le savent. D’allure un peu désuète, aux dessins pas franchement modernes, cette bande-dessinée ne donne pas tout de suite envie. (Ça faisait des mois que je tournais autour sans me décider). Un titre peu banal, une couverture et des dessins pas tout à fait en accord avec l’édition de « là tout de suite maintenant », je prends!
Et quel dommage d’être passée à côté depuis quelque temps. Plus encore qu’une BD, ces 213 pages constituent un des romans graphiques les plus significatifs de ces dernières années. Racontée comme un roman, à la structure riche et solide, l’intrigue est dense et fait la panorama de plus de 80 ans d’histoire Espagnole. Antonio Altarriba y fait une description non-exhaustive de la vie de son père.
De son enfance dans des terres éloignées de l’Espagne du début du siècle au Franquisme et à la Seconde guerre mondiale, une société en transformation économique politique et culturelle y est brossée sans retenue. Les décisions, bonnes ou mauvaises du pays ou du personnage principal y sont décrites avec violence mais toujours avec respect. Le dernier quart du livre qui décrit la fin de la vie du vieil homme est tout aussi surprenante et nous rend à une réalité proche de nous qui n’est pas moins empreinte d’émotions.
Un très beau texte qui se lit avec patience (n’espérez pas finir ce livre en une heure ou deux) et admiration d’une vie historique.
L’art de voler, Antonio Altarriba et Kim, Denoël, 2011